lundi 25 novembre 2013

"Spring" - Rosenrot

Auf einer Brücke ziemlich hoch
Hält ein Mann die Arme auf
Da steht er nun und zögert noch
Die Menschen strömen gleich zuhauf
Auch ich lass mir das nicht entgehen
Das will ich aus der Nähe sehen
Ich stell mich in die erste Reihe
Und schreie

Der Mann will von der Brücke steigen
Die Menschen fangen an zu hassen
Bilden einen dichten Reigen
Und wollen ihn nicht nach unten lassen
So steigt er noch mal nach oben
Und der Mob fängt an zu toben
Sie wollen seine Innereien
Und schreien

Spring
Spring
Spring
Spring
Erlöse mich
Spring
Enttäusch mich nicht
Spring für mich
Spring ins Licht
Spring

Jetzt fängt der Mann zu weinen an
Heimlich schiebt sich eine Wolke
Und fragt sich - Was hab ich getan?
Vor die Sonne, es wird kalt
Ich wollte nur zur Aussicht gehen
Die Menschen laufen aus den Reihen
Und in den Abendhimmel sehen
Und sie schreien

Spring
Spring
Sie schreien
Spring
Spring
Erlöse mich
Spring
Enttäusch mich nicht
Spring für mich
Spring ins Licht
Spring

Heimlich schiebt sich eine Wolke
Vor die Sonne, es wird kalt
Doch tausend Sonnen brennen nur für dich

Ich steig mich heimlich auf die Brücke
Tret ihm von hinten in den Rücken
Erlöse ihn von dieser Schmach, ja
Und schrei ihm nach

Spring
Spring
Spring
Spring
Erlöse dich
Spring
Enttäusch mich nicht

Spring, spring für mich
Spring
Enttäusch mich nicht
Spring



« Spring » correspond à l'une de ces narrations, presque métaphoriques, qui composent Rosenrot. Expression d'un voyeurisme et d'une violence exacerbée, Lindemann choisi une double narration surprenante : le protagoniste qui parle à la première personne est d'abord spectateur de la scène puis en devient l'acteur principal, qui va impulser l'action ; la narrateur donne aussi le point de vue, les sentiments de l'homme sur le pont.

Le premier sens du texte est assez explicite et raconte l'histoire d'un homme qui « Sur un pont assez haut / […] se tient les bras lever ». Alors qu'il « voulai[t] seulement admirer la vue / Et regarder le ciel du soir », la foule interprète de manière erronée son geste et pense qu'il veut se suicider et lui crie « Saute ». Au cœur de cette foule se trouve le narrateur s'exprimant à la première personne qui va accomplir la volonté des gens autour : « Moi aussi, je ne veux pas manquer ça / Je veux voir ça de près / Je me mets au premier rang / Et crie ». De simple spectateur il va se faire porteur de la « haine » de la « populace » qui « se déchaîne ». La foule empêche l'homme de « redescendre du pont / […] / Alors il remonte une nouvelle fois », c'est alors que le narrateur se « glisse en cachette sur le pont / Lui donne un coup de pied par derrière dans le dos / Pour le délivrer de cette honte ». Le suicide rêvé par la foule se transforme en meurtre.

Toutefois, il ne s'agit pas véritablement d'un meurtre, mais d'un suicide par procuration. Le fait que Lindemann ait choisi d'avoir deux protagonistes principaux, deux narrateurs, n'est pas du au hasard : ces deux personnages semblent être l'image d'un même esprit. L'homme sur le pont devient une sorte de catharsis pour la foule et tout particulièrement pour le protagoniste s'exprimant à la première personne. Il crie : « Saut / Délivre moi / Saute / Ne me déçois pas / Saute pour moi ». Ainsi ces deux personnages peuvent être la personnification de deux volontés opposées au sein d'un même esprit : à la fois l'envie et la peur de sauter. Le désespoir et la peur de l'un, « Maintenant l'homme commence à pleurer / […] / Il se demande – qu'est-ce que j'ai fait », fait écho à la haine et au besoin de violence de l'autre, « la populace se déchaîne / Ils veulent ses tripes / Et crient ».

Au delà de ce premier sens, Rammstein décrit un certain voyeurisme dont ils sont eux-même victimes. En tant qu'artistes, ils se mettent en valeur, se montrent, comme l'homme sur le pont. Leur but n'est rien de plus que de se montrer dans la lumière (« Saute dans la lumière »). L'envie de se montrer doit faire face à l'envie de la foule, leur public, les média, de regarder. Ce regard est avide et malsain, destructeur. C'est le couplet suivant qui permet d'interpréter la chanson de cette manière : « Un nuage passe furtivement / Devant le soleil, il commence à faire froid / Et pourtant, mille soleils brillent rien que pour toi ». Le soleil peut ici représenter le besoin de créer et le besoin de reconnaissance, mais lorsqu'un nuage passe ce qui réchauffait leurs cœurs disparaît, ils doivent alors faire face à une tout autre lumière : les « milles soleils » sont les yeux du public, les projecteurs et les flash des photographes. En ce sens le « Ne me déçois pas » incarne très bien la voix du public.

De ce point de vue là, le protagoniste s'exprimant à la première personne est une personnification du public qui a des attentes particulières et qui considère que le groupe lui appartient. Face à cette pression extérieure, les membres du groupes ne peuvent rien, ils en deviennent esclave. Si la création artistique était un véritable bonheur, les conséquences de la notoriété sont douloureuses. Composer de la musique est un acte de création et paradoxalement les conséquences de cet acte créateur sont destructrices.


« Spring » est une narration – métaphore dans laquelle Rammstein avoue à demi-mot les conséquences de la notoriété : ils semblent happés par la foule, le public, au point de pouvoir en mourir. L'album Rosenrot semble au premier abord beaucoup plus froid et moins personnel (en ce qui concerne les textes), parce que Lindemann a choisi des narrations plus impersonnelles. Toutefois, ceci marque une véritable maturité dans sa production, il y a toujours au delà de ces histoires, des révélations très intimes que l'on découvre seulement en faisant un petit effort de reflexion.

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