lundi 28 octobre 2013

"Ohne dich" - Reise, reise

Ich werde in die Tannen gehen
Dahin wo ich sie zuletzt gesehen
Doch der Abend wirft ein Tuch aufs Land
Und auf die Wege hinterm Waldesrand
Und der Wald er steht so schwarz und leer
Weh mir, oh weh
Und die Vögel singen nicht mehr

Ohne dich kann ich nicht sein
Ohne dich
Mit dir bin ich auch allein
Ohne dich
Ohne dich
Ohne dich zähl ich die Stunden
Ohne dich
Mit dir stehen die Sekunden lohnen nicht

Auf den ästen in den Gräben
Ist es nun Still und ohne Leben
Und das Atmen fällt mir ach so schwer
Weh mir, oh weh
Und die Vögel singen nicht mehr

Ohne dich kann ich nicht sein
Ohne dich
Mit dir bin ich auch allein
Ohne dich
Ohne dich
Ohne dich zähl ich die Stunden
Ohne dich
Mit dir stehen die Sekunden lohnen nicht
Ohne dich
Ohne dich

Und das Atmen fällt mir ach so schwer
Weh mir oh weh
Und die Vögel singen nicht mehr

Ohne dich kann ich nicht sein
Ohne dich
Mit dir bin ich auch allein
Ohne dich
Ohne dich
Ohne dich zähl ich die Stunden
Ohne dich
Mit dir stehen die Sekunden lohnen nicht
Ohne dich

Ohne dich
Ohne dich
Ohne dich
Ohne dich




« Ohne dich » reste une chanson incontournable du groupe, elle est très représentative des thématiques abordées par Lindemann. À la première lecture, et l'analyse du titre, nous montrent un thème des plus classiques : la fin d'une histoire d'amour, une rupture. Dans les images qu'il choisit Lindemann reste très traditionnel aussi, évoquant les poètes romantiques du XIXème siècle. Il évoque « les sentiers derrière la lisière de la forêt », « les sapins », la nature. Ce lieu est associé dans l'esprit du narrateur à la personne partie : « Je vais aller sous les sapins / Là où je l'ai vu en dernier lieu », toutefois il n'est plus aussi idyllique qu'auparavant, puisque « la forêt se dresse si noire et vide [...] Et les oiseaux ne chantent plus ». Les souvenirs associés à ce lieu, le vide que laisse la personne aimée et partie, est cause de souffrances : « Et la respiration m'est, ah ! Si difficile / Pauvre de moi, malheur ». Le manque est tel que le narrateur dit avoir perdu sa raison d'exister: « Sans toi je ne peux pas être ».

Ainsi, le sujet abordé par cette chanson et la manière de le traité est on ne peut plus traditionnel. Toutefois, Lindemann y insère avec subtilité son univers désenchanté. Si le manque de l'autre est douloureux, « Sans toi je ne peux pas être […] Sans toi je compte les heures », l'évocation de la relation passée n'est pas idéalisée. « Avec toi je suis seul aussi […] Avec toi les secondes ne valent pas la peine » : la présence de l'autre n'était donc pas idéale, et le narrateur ressentait, même en présence de la personne aimée, une grande solitude. Rammstein évoque ici la difficulté des relations amoureuses, de la vie de couple. On peut aimer à ne plus pourvoir se passer de l'autre, et en même temps, parfois, l'autre ne nous comprend pas et même lorsqu'il est là nous sommes seuls, perdus malheureux. Ces moments d'incompréhension sont tout simplement du temps perdu, du temps pour rien, les secondes deviennent des heures, « n'en valent pas la peine ».

Ainsi, si la rupture est douloureuse, Lindemann n'idéalise pas la relation amoureuse, il la décrit dans tous ces aspects. Le désenchantement est total : l'amour n'apporte que de la peine, que l'être aimé soit présent ou ailleurs.

Au delà de cette première interprétation, cette chanson prend un sens plus personnel pour Rammstein. On peut en effet considérer que le texte évoque les relations des membres du groupe entre eux. « Sans toi je ne peux pas être […] Avec toi je suis seul aussi […] Sans toi je compte les heure […] avec toi les secondes ne valent pas la peine » : Lindemann évoque le fait que les uns sans les autres les membres du groupe ne sont rien. Ils existent par leur musique, par leur art, et cet art ne peut être que lorsqu'ils sont ensembles. Les membres de Rammstein ont toujours insisté sur le fait qu'ils travaillent ensembles, dans la même direction, qu'il n'y a pas de leader. Chacun à besoin des cinq autres pour exister, en tant qu'artiste, pour exister tout court, parce que, sans doute, leur musique est leur raison d'exister. Toutefois, comme dans une histoire d'amour, les relations des membres entre eux ne sont pas idéales. Ils peuvent parfois ne pas être sur la même longueur d'ondes, ne pas avoir les mêmes attentes, se sentir incompris. Je pense qu'on peut dire que ce texte évoque à demi-mots les difficultés et les tensions que le groupe a traversé pendant la création de Mutter, sans sur-interpréter. Reise, Reise arrive après cette période difficile pour le groupe. « Ohne dich » vient mettre des mots sur les maux de cette période, et formuler le mal qui les a atteint est aussi une manière de panser la blessure.


Ce texte montre bien tout l'art de Lindemann qui propose différents niveaux de lecture. Il touche l'auditeur qui peut y voir un miroir de ses propres sentiments, puis il révèle, en dessous de la surface, un peu du groupe, un peu de Rammstein. 

jeudi 24 octobre 2013

"Bück dich" - Sehnsucht

Bück dich befehl ich dir
Wende dein Antlitz ab von mir
Dein Gesicht ist mir egal
Bück dich

Ein Zweibeiner auf allen Vieren
Ich führe ihn spazieren
Im Passgang den Flur entlang
Ich bin enttäuscht
Jetzt kommt er rückwärts mir entgegen
Honig bleibt am Strumpfband kleben
Ich bin enttäuscht total enttäuscht

Bück dich
Bück dich
Bück dich
Bück dich
Das Gesicht interessiert mich nicht

Der Zweibeiner hat sich gebückt
In ein gutes Licht gerückt
Zeig ich ihm was man machen kann
Und fang dabei zu weinen an
Der Zweifuß stammelt ein Gebet
Aus Angst weil es mir schlechter geht
Versucht sich tiefer noch zu bücken
Tränen laufen hoch den Rücken

Bück dich
Bück dich
Bück dich
Bück dich

Bück dich befehl ich dir
Wende dein Antlitz ab von mir
Dein Gesicht ist mir egal
Bück dich noch einmal

Bück dich (X5)




Chanson qui, a priori, ne présente aucun sens caché, « Bück dich » ne semble pas mériter un commentaire. Toutefois certains éléments ont un sens qui m'échappe encore. Ainsi, je propose ici un commentaire afin d'ouvrir une discussion.

Narration d'un acte sexuel, cette chanson présente sans détour une relation dominant/dominé dès le premier couplet. Le narrateur est le dominant, il s'adresse à son/sa partenaire sur le mode impératif : « Penche-toi, je te l'ordonne ». Dès le second vers on peut ressentir un certain malaise puisque le narrateur ne veut pas voir le visage de l'autre, il insiste sur cet aspect puisque la même chose est répétée successivement à deux reprises : « Et détourne ton visage de ma vue / Je me fiche de ton visage ». Comment interpréter ceci ? À la lumière de la thématique de l'album, on peut lire cet acte comme la volonté de retrouver une jouissance passée et perdue. Ainsi on retrouve dans « Büch dich » les deux sens du mot Sehnsucht, à la fois désir et mélancolie.

On remarque que pour les deux couplets centraux, le narrateur ne s'adresse plus à son/sa partenaire, mais qu'il se concentre sur la description de ce qu'il ressent. Ceci va dans le sens de l'interprétation que je viens d'évoquer, la volonté de ressentir à nouveau un plaisir sexuel éprouvé autrefois.

Les trois premiers vers de ce couplet décrivent la relation presque sadomasochiste : le narrateur veut que l'autre ne soit plus un être humain, mais un animal : « Un bipède sur ses quatre pattes / Je l'emmène faire sa promenade / À l'amble, le long du couloir ». En traitant son partenaire ainsi il veut absolument oublier l'identité, le privé d'humanité pour atteindre un plaisir personnel. Mais on sait déjà qu'il n'y parviendra pas : « Je suis déçu ».
C'est à partir de ce moment que je ne suis pas vraiment sûre de mon interprétation et qu'elle mérite d'être discutée. Cette simple phrase, « Je suis déçu » semble avoir un sens très concret, que l'on peut deviner en interprétant les deux vers suivant. « À présent il recule vers moi / Du miel reste collé à son porte-jarretelles ». D'après la description, la relation sexuelle n'a pas encore eu lieu, il s'agissait simplement des préliminaire (qui consistent à rabaisser l'autre en le traitant comme un animal). Le/la partenaire recule pour passer à l'acte (on l'imagine aisément à quatre pattes devant le narrateur). Que représente le « miel [resté] collé au porte-jarretelles » ? Il s'agit du sperme. Ainsi le « je suis déçu » répété deux fois dans ce couplet signifie que la narrateur a éjaculé avant même d'être passé à l'acte.
Ainsi le narrateur ne souhaite pas voir le visage de l'autre parce qu'il a honte.

Le troisième couplet montre la honte, et sans doute, au delà, le désespoir du narrateur qui se « met[s] à pleurer ». D'abord, le/la partenaire se tient comme il faut, « Le bipède s'est penché / S'est mis comme il faut à la lumière », et semble attendre la suite. Mais rien ne se passe concrètement car le narrateur « lui montre ce que l'on peut faire » mais est incapable de passer à l'acte, puisque pour lui tout et déjà terminé. Le narrateur est alors désespéré de ne pas maîtriser son corps et pleure. Il ressent alors le désir et la mélancolie de ne pas parvenir à faire l'amour (comme avant). « Le bipède » semble dans l'incompréhension, il s'est tourné, penché, et ne voit pas ce qui se passe, il est donc effrayé, « Il a peur, car je le sens plus mal ». Alors, pour plaire au narrateur « Il essaie de se baisser encore plus » mais rien ne se passe et « Des larmes coulent le long de son dos ».

La chanson se termine par le même couplet qu'il y a au début : cette composition circulaire traduit un éternel recommencement, comme si le problème du narrateur ne pouvait se résoudre, et à défaut de ne pouvoir penser à l'acte il ne peut que répéter « Bück dich ».

mardi 8 octobre 2013

"Sonne" - Mutter


Eins, zwei, drei, vier, fünf, sechs, sieben, acht, neun, aus

Alle warten auf das Licht
Fürchtet euch fürchtet euch nicht
Die Sonne scheint mir aus den Augen
Sie wird heut Nacht nicht untergehen
Und die Welt zählt laut bis zehn

Eins, hier kommt die Sonne
Zwei, hier kommt die Sonne
Drei, sie ist der hellste Stern von allen
Vier, hier kommt die Sonne

Die Sonne scheint mir aus den Händen
Kann verbrennen kann euch blenden
Wenn sie aus den Fäusten bricht
Legt sich heiß auf das Gesicht
Sie wird heut Nacht nicht untergehen
Und die Welt zählt laut bis zehn

Eins, hier kommt die Sonne
Zwei, hier kommt die Sonne
Drei, sie ist der hellste Stern von allen
Vier, hier kommt die Sonne
Fünf, hier kommt die Sonne
Sechs, hier kommt die Sonne
Sieben, sie ist der hellste Stern von allen
Acht, neun, hier kommt die Sonne

Die Sonne scheint mir aus den Händen
Kann verbrennen kann dich blenden
Wenn sie aus den Fäusten bricht
Legt sich heiß auf dein Gesicht
Legt sich schmerzend auf die Brust
Das Gleichgewicht wird zum Verlust
Lässt dich hart zu Boden gehen
Und die Welt zählt laut bis zehn

Eins, hier kommt die Sonne
Zwei, hier kommt die Sonne
Drei, sie ist der hellste Stern von allen
Vier, und wird nie vom Himmel fallen
Fünf, hier kommt die Sonne
Sechs, hier kommt die Sonne
Sieben, sie ist der hellste Stern von allen
Acht, neun, hier kommt die Sonne




« Sonne » est l'une des chansons de Rammstein qui possède une multitude d'interprétations, et c'est là sa force et sa beauté.

Au sens propre, Lindemann rend hommage à un boxeur, Vitali Klitschko : ainsi le décompte du début, puis pendant le refrain, est une évocation directe du match de boxe avec le « aus » (« K.-O. ») qui met fin au combat. Ainsi le « Soleil » est l'image utilisée pour évoquer la figure du boxeur, et en ce sens on peut comprendre le reste du texte dans un sens concret. « Quand il se pose sur tes poings
/ Il s'étale sur ton visage et le brûle / Il ne se couchera pas ce soir » : ici le « Soleil » évoque le puissance des coups donnés par le boxeur, qui, aussi puissant que le soleil, il ne se couchera pas, il ne perdra pas le combat « ce soir ». On remarque un progression dans le texte qui est à l'image du déroulement du combat, si d'abord le narrateur nous dit que le boxeur ne se « couchera pas », des deux combattants l'un doit renoncer : « Tu te laisses tomber lourdement au sol / Et le monde compte jusqu'à dix ».

Au delà de ce sens originel, qui est l'intention première du groupe, le texte a un sens symbolique très profond, qui n'est d'ailleurs peut-être pas intentionnel mais qui mérite d'être soulevé.

Cette chason signifie que tout le monde possède un Soleil (ainsi l'astre prend un sens métaphorique plus étendu que celui de l'image du boxeur) : un amour, une passion, une drogue, etc. Ce Soleil nous éclaire, « Alle warten auf das Licht », il est nécessaire à notre existence, pourtant dès le deuxième vers « Fürchtet euch », est présenté son aspect dangereux, on risque de se brûler.
La chanson parle de cette dernière étape où ce qui nous a fait du bien commence à nous ronger : « Die Sonne scheint mir aus den Händen / Kann verbrennen kann euch blenden / Wenn sie aus den / Fäusten bricht / Legt sich heiß auf das Gesicht ».

Au delà de cette première interprétation, je vois derrière ce texte une sorte de vision apocalyptique (dans le sens biblique du terme, mais pas seulement). Le narrateur nous dit que tout le monde compte à voix haute jusqu'à dix (« Und die Welt zählt laut bis zehn »), ainsi le Soleil de chacun devient celui de tous, et nous devons nous résoudre à la fin. « L'étoile la plus brillante » embrase l'univers et met un terme à notre monde.

Symboliquement le Soleil peut être l'astre lui même qui finira par brûler notre planète, mais c'est aussi l'image de Dieu (du Dieu chrétien qui trônera lors du jugement dernier, par exemple) qui a créé et qui détruira le monde. À vous de choisir votre interprétation. Plus largement, que l'on choisisse l'interprétation divine ou scientifique, le sens du texte est le même dans les deux cas : rappelez vous que ce que vous aimé peut finir pas vous blesser, rappelez vous que vous n'êtes rien face à une puissance plus grande (le Soleil ou Dieu). Plus généralement, je vois ce texte comme une description de la vanité humaine, du memento mori.