mercredi 9 septembre 2015

Die Ostalgie - « Amerika » / « Moskau » - Reise, Reise


Étude faite pour un exposé oral dans le cadre d'un cours de civilisation sur la question de l'identité allemande aujourd'hui. Le style d'écriture n'est donc pas des meilleurs !
Ce travail consiste à présenter ce qu'est l'Ostagie, comment elle s'exprime, et dans quelle mesure la RDA fait partie de l"histoire de l'Allemagne.
Pour ceux qui souhaite uniquement lire la partie consacrée à Rammstein, c'est dans le II - B.
Bonne lecture.



En guise d'introduction, il faut d'abord donner la définition de l'Ostalgie. Le terme est composé du mot Ost, pour Est et de la fin de die Nostalgie. Le terme est utilisé pour la première fois par un chanteur venu de l'ex-Allemagne de l'Est : Uwe Steimle. Il utilise se néologisme pour évoquer la vie en RDA.
Une composition simple, mais une définition complexe : à savoir, l'Ostalgie a-t-elle une connotation positive ou négative ? Pour certains historiens et sociologues le terme est neutre. Toutefois, pour le spécialiste Thomas Ahbe le mot aurait une connotation négative, du fait que l'Ostalgie est composé de deux termes dépréciatif : l'Est, synonyme d'arriération, et la nostalgie synonyme de passéisme, d'incapacité à aller de l'avant.
Pour Lothar Fritze le terme est à nuancer. Il préfère parler de « Partialnostalgie » ou de « Pseudonostalgie », car, selon lui, il n'y a pas assez de nostalgiques pour parler de nostalgie et les frustrations engendrées par les nouvelles conditions de vie à l'Est et la critique d'un capitalisme débridé ne sont pas suffisants pour utiliser le terme d'Ostalgie.
En ce qui concerne mon propos, je propose d'utiliser ce terme sans aucune connotation, mais comme la simple expression d'une nostalgie de l'Est. Ce qui m'intéresse particulièrement c'est le fait que cette nostalgie de la RDA se soit exprimée pleinement à travers des œuvres cinématographiques, et que ces films ont su traduire, montrer un sentiment qui semble être partagé par un grand nombre d'ex-allemands de l'Est.
Comment l'Ostalgie, phénomène cinématographique, trouve-elle un éco chez les allemands originaires de RDA ? Et dans quelle mesure l'Ostalgie fait-elle partie de l'identité allemande ?
Pour répondre à cette double problématique, je vous propose l'analyse des films qui ont montré cette Ostalgie : à savoir, comment l'ont-ils montré et dans quelle mesure ils sont en phase avec la réalité. D'où la deuxième partie, consacrée à des témoignages d'ex-allemands de l'Est. Enfin, je vous propose d'aborder l'Ostalgie du point de vue de la société allemande, de son impact sur la définition de son identité.





I. Ein Filmphänomen

     A. Sonnenalle

Comme je l'évoquais en introduction, l'Ostalgie est avant tout un phénomème cinématographique qui s'est pleinement exprimée dans trois films allemands. Le premier est sorti a été réalisé par Leander Haußmann en 1999. Il s'intitule Sonnenallee, du nom d'une rue de Berlin dont la partie sud était un point de passage entre Berlin-Est et Berlin-Ouest. Il met en scène différents personnages habitant cette rue, à proximité immédiate de die Grenzgebeit (zone frontière), dans les années 1970. Le personnage principal, Micha, est un adolescent amoureux qui évolue dans un monde hétéroclite : sa mère est obnubilée par le passage à l'ouest et tente d'usurper l'identité d'une touriste venue de l'autre côté du mur, un père très critique envers le régime de la RDA, un oncle venant de l'ouest, un voisin membre de la Stasi et une bande de copains dont les principales préoccupations sont les filles et le rock.
Le film évoque, dix années après la chute du Mur, la vie de la jeunesse allemande en RDA d'une manière qui pouvait, au moment de sa sortie, être plutôt surprenante, notamment pour les spectateurs de l'ouest. En effet, l'oeuvre ne montre pas une jeunesse persécutée et brimée par le régime en place, mais plutôt des personnages insouciants.
Si Sonnenalle est la première expression cinématographique de l'Ostalgie, le film n'a pas véritablement marqué les esprits. Il faut attendre encore quelques années pour que sorte le film emblématique de cette Ostalgie...


     B. Good bye Lenin !

C'est en 2003 que sort Good bye Lenin !, l'oeuvre de Wolfgang Becker, qui en quelques semaines à peine va devenir un film culte. Le film use d'un ton à la fois humoristique et mélancolique pour évoquer la RDA. Le début du film s'inscrit dans la fin des années 1970 et présente la famille Kerner. Christiane, la mère, se retrouve seule à élever ces deux enfants, Ariane et Alexander, alors que leur père vient de fuir à l'Ouest. Elle décide alors de s'investir dans la vie sociale du régime communiste en s'investissant notamment auprès de la Freie Deutsche Jugend. Une elipse nous emmène jusqu'en octobre 1989. Christiane doit participer aux célébrations du 40ème anniversaire de la RDA. En route, sa voiture est arrêtée à cause du désordre causé par une d'une manifestation violemment réprimée par les forces de police. Elle aperçoit parmi les manifestants son fils Alex qui se fait arrêter avec violence. Elle a un infarctus et tombe dans le coma.
Quelques semaines plus tard le mur de Berlin tombe : Ariane et Alex découvrent la vie occidentale et s'intègrent à cette nouvelle société. Christiane se réveille en juin 1990.
Les médecins conseillent à Alex d'éviter à sa mère un nouveau choc qui pourrait causer une rechute. Il décide, avec l'aide de sa sœur, de cacher à Christiane les changements politiques qui ont eu lieu pendant son coma. Ils vont alors réaménager l'appartement comme il était du temps de la RDA, cachent les nouvelles technologies, retrouvent les marquent des produits vendus à l'Est. Avec l'aide de leur entourage, l'illusion fait effet. Ils vont même jusqu'à tourner de faux journaux télévisés. Ils y insèrent les images de foules traversant les frontières et lui font croire que des millions d'allemands de l'Ouest fuient le capitalisme en s'exilant à l'Est, où l'asile leur est accordé.

Comme je le disais, ce film a eu un succès immédiat auprès du public allemand. Benoit Pivert, maître de conférence à l'université de Paris XI écrit : « Si en 2003 le film de Wolfgang Becker Good bye Lenin ! Est devenu en quelques semaines un film culte, sans nul doute est parce qu'[il] a su faire vibrer la sensibilité particulière des spectateurs à un moment précis de leur histoire individuelle et collective. » En effet, le film a fait revivre le monde disparu de la RDA. C'est probablement avec émotion que les ex-allemands de l'Est on pu voir à l'écran les anciens produits de consommation, leur journal télévisé ou encore des anciens héros tel que le cosmonaute Sigmund Jähn.
Le film est probablement sorti au moment où les ex-citoyens de RDA ont assumé une véritable désillusion quant à la société capitaliste qui s'est imposée à eux au cours des années 1990. Peut-on analyser cette Ostalgie comme une volonté de « réhabiliter » la RDA ? Certains reprochent au film de nier totalement la réalité de la dictature communiste, et aux ostalgiques d'embellir la réalité, de dire : « c'était mieux avant ». Certes, le film n'a pas pour but de dénoncer ce régime autoritaire, toutefois il montre la réalité des faits : la volonté d'aller à l'Ouest pour avoir une vie meilleure, les violences policière contres les manifestants de l'automne 1989, le manque de choix et ou encore « l'arriération » de la RDA en ce qui concerne les avancées technologiques. Good bye Lenin ! réhabilite une société révolue, qu'on a rejeté, que les ex-allemands de l'Est ont rejeté. Face aux désillusions apportées par le monde capitaliste, ils ont eu besoin de se ré-approprier leur passé, d'assumer leur identité. Une phrase du héros-narrateur Alex résume à merveille le sentiment « ostalgique » alors qu'il fait croire à sa mère que des foules venues de l'Ouest fuient la société capitaliste pour la RDA : « Je faisais de la RDA ce que j'aurais aimé qu'elle soit »


     C. Das Leben der Anderen

Les films « ostalgiques » semblent porter cette mission de ré-appropriation, de réhabilitation. Malgré cette volonté d'insister sur le fait que « tout n'était pas mauvais » en RDA, ils rappellent également les difficultés et la dictature qu'était la RDA. C'est particulièrement le cas d'un film dont le succès a dépassé Good bye Lenin ! : Das Leben der Anderen, réalisé en 2007 par Florian Henckel von Donnersmarck.
L'histoire se déroule en 1984 à Berlin-Est. Une membre de la Stasi ; Gerd Wiesler (« HGW XX/7 ») est chargé de surveiller le dramaturge Georg Dreyman. Wiesler l'ignore, mais il s'agit en fait d'une intrigue orchestrée par le ministre est-allemand de la culture Bruno Hempf, lequel est amoureux de la compagne de Dreyman, l'actrice Chista-Maria Sieland, et souhaite compromettre son rival pour l'éliminer.
Wiesler, installé dans les combles de l'immeuble de Dreyman et équipé d'un imposant matériel d'écoute, s'imprègne de la vie quotidienne des personnes qu'il espionne nuit et jour, s'en émeut parfois et il s'éloigne peu à peu de sa mission : il ne signale rien lorsque Dreyman, à la suite du suicide de son ami Jerska — metteur en scène dont la carrière a été détruite —, s'affaire à la rédaction d'un article de presse destiné à révéler le taux de suicide anormalement élevé en RDA. En outre, cet article doit être publié dans le magazine ouest-allemand Der Spiegel. Pour tromper une éventuelle enquête sur l'origine de l'article, Dreyman utilise une machine à écrire qui lui a été fournie par le magazine édité en RFA. Progressivement, Wiesler est ainsi amené à rédiger des rapports incomplets ou falsifiés, dans le but de protéger l'homme qu'il est censé surveiller.
Lorsque Christa-Maria Sieland, inquiétée en raison de son usage de médicaments interdits, est finalement interrogée dans les locaux de la Stasi, elle est contrainte — pour sauver sa carrière — de dénoncer son compagnon concernant l'article et le lieu ou est cachée la machine à écrire dans l'appartement. Wiesler mis au courant de la descente de police qui doit avoir lieu chez Dreyman va entrer dans l'appartement et prendre la machine à écrire pour le protéger.

Je le disais, Das Leben der Anderen a remporter un succès encore plus grand que Good bye Lenin ! en obtenant de nombreux prix en Allemagne et également à l'étranger dont un Oscar en 2007. On a parfois reproché à Good bye Lenin ! de ne pas aborder le sujet de la Stasi, de faire comme si cela n'avait pas existé. Das Leben der Anderen met cette problématique de la surveillance, des abus des plus hauts membres du parti, de cette absence totale de liberté de penser et de s'exprimer, mais également de ceux qu'on appelait des « collaborateurs officieux » qui, par ce qu'on les faisait chanter ou pour obtenir une promotion dénonçaient leurs voisins, leurs amis, ou encore des membres de leurs familles. Ce film met en évidence la perversité du système auquel personne ne peut échapper. On pourrait alors penser qu'il ne s'agit pas d'un film « ostalgique », dans le sens où il ne regrette pas, ne pleure pas la période de la RDA. Le mode nostalgique, très palpable dans Good bye Lenin !, n'est absolument pas présent ici, car le rythme du film montre un système rigide est implacable.


     D. Conclusion provisoire

Toutefois, si elles s'opposent dans le ton, ces deux œuvres sont complémentaires. En effet, les deux films ne montrent pas la même catégorie de la population : dans le premier il s'agit de rendre compte de la vie de citoyens lambda, se démenant dans le quotidien. Le second, s'intéresse à une autre catégorie de la population, plutôt les intellectuels et les personnes ayant une image publique. Ces derniers étant plus susceptibles d'être confronté à la police secrète que les autres. Ces deux films me semblent tout à fait complémentaires, l'un ne rejetant pas l'autre. Parce que oui, la RDA c'était à la fois la Stasi, l'état totalitaire, mais également un pays où des allemands sont nés, ont grandi et ont été heureux.
C'est pour cela que je voudrais maintenant aborder quelques témoignages de personnes nées et ayant grandi en RDA.



II. Zeugnisse

     A. Familie W.

Herr und Frau W. sont originaires de RDA, d'une petite ville située à l'Ouest de Leipzig. Il sont nés en 1967 et 1970. Ils m'ont accueilli chez eux à Karlsruhe pour parler de ce qu'est l'Ostalgie pour eux et également de leur enfance et de leur jeunesse à l'Est. L'entretien s'est déroulé en anglais, allemand et français. Je ne compte pas rendre ici l'intégralité de notre entretien qui a été très riche, mais je souhaite évoquer les début de notre conversation.
J'ai débuté l'entretien par la question suivante : « Qu'est-ce que vous pensez ou ressentez lorsque vous entendez le mot Ostalgie ? ». La première chose que nous évoquons ensemble et le fait qu'ils sont heureux d'avoir à nouveau accès aux marques de produits qui étaient consommés en RDA. Il n'y avait pas le choix à l'époque : si vous vouliez acheter du café il n'y avait qu'une marque de café, etc. C'est une des thématique abordée dans Good bye Lenin !, le héros cherchant à tout prix des produits de l'Est pour sa mère.
Puis, très vite nous abordons ensemble la question de la difficulté de savoir ce qu'est l'Ostalgie. Frau W. commence par me dire qu'elle ne sait pas vraiment si l'Ostalgie est quelque chose de personnel, c'est-à-dire si cela correspond à ses souvenirs d'enfance, ou bien si c'est un sentiment collectif. Elle a ainsi soulevé une problématique au cœur de la définition de l'Ostalgie et de la la légitimité de ce terme. Je lui ai répondu que justement, sa question est au cœur du débat, et que je n'était pas sûre qu'il soit véritablement possible d'y répondre. J'ai insisté sur le fait que j'avais un intérêt pour ses souvenirs. Si les destins personnels ne ferons jamais l'Histoire, les témoignages sont des données indispensable pour comprendre une époque.
Ce qui m'a particulièrement marqué au cours de notre entretien a été le moment où Frau Worg a évoqué son tout premier passage vers l'Ouest. Elle était très émue. Cette émotion n'était pas celle d'une liberté retrouvée. Il me semble que c'est à ce moment qu'ils ont compris que leur monde était complètement bouleversé, que la société qu'ils avaient connu était entrain de disparaître.

     B. Rammstein : un groupe ostalgique ?

          1. Christoph Schneider et Richard Kruspe : un souvenir contrasté de la vie « à l'Est »
Comme nous l'avons abordé avec la famille Worg, le sentiment « ostalgique » semble avant tout d'ordre individuel. Quels souvenirs et quels sentiments gardons-t-on de son passé? C'est pour cela qu'avant d'aborder la question de Rammstein comme groupe « ostalgique », il me semblait pertinent d'aborder rapidement les points de vues individuels des membres.
J'ai choisi de réunir dans une même sous-parties les témoignages d'un des guitariste Richard Kruspe et du batteur Christoph Schneider, car ce qu'ils exprime à l'égard de leur passé en RDA est contrasté. Kruspe exprime le fait qu'il a très vite ressenti un climat d'emprisonnement à l'Est et a très vite été fasciné par l'autre côté, par les États-Unis notamment. Il changera même son prénom et abandonne Zven, qu'il trouvait « trop allemand » pour Richard au son plus américains. Dans ces différentes évocations de sa jeunesse, il souligne le fait qu'il était extrêmement difficile d'avoir accès à la culture et à la musique, et surtout à la musique de l'Ouest. Au delà de ces difficultés et de se sentiment d'oppression quotidien, il va connaître de près le fonctionnement implacable de la dictature. À l'automne 1989, alors qu'il se trouve à Berlin, en sortant du métro il se retrouve au sein d'une des manifestation contre le régime. Il est arrêté et emprisonné pendant une quinzaine de jours. Il vit l'absurdité des interrogatoires menés par la Stasi puis, sans raison particulière, il est relâché. Il va alors fuir à l'Ouest avec un ami. Il explique qu'il fait cela sur un coup de tête, sans prévenir personne. Dans son témoignage il insiste particulièrement sur le sentiment qu'il a ressenti après, une fois à Berlin-Ouest : il a prit conscience qu'il avait tout laisser derrière lui, abandonné ses proches, mais surtout à quel point il se sentait comme un étranger dans un pays qui était pourtant aussi l'Allemagne. Quelques jours plus tard le mur est tombé.
Schneider a lui aussi un souvenir contrasté de la RDA. Il utilise, comme l'on fait les membres de la famille Worg, les termes de « sombre » et « secret » pour évoquer la vie quotidienne à l'Est. Il souligne toutefois qu'il n'a jamais véritablement ressenti un absence de liberté notamment en temps que musicien. Il dit : « on avait prit l'habitude de faire des trucs ultra provoc' et en Allemagne de l'Est ça ne dérangeait pas tant que ça. On faisait ce qu'on voulait sans se demander si un jour il y aurait un album qui plairait au grand public. De toute façon ça ne pouvait pas toucher le grand public, on se produisait dans de petits clubs et très rares étaient les groupes qui arrivaient à sortir un album ». Sans jamais vraiment prononcer le mot, il aborde la thématique du bonheur, que nous allons aborder avec le prochain témoignage. Schneider souligne tout particulièrement le fait que cette vie à l'Est est étroitement liée à ce qu'est le groupe, sa musique, ses textes.

          2. Flake Lorenz : une Ostalgie assumée.
Le membre du groupe qui s'exprime volontiers sur sa vie à l'Est Flake Lorenz. Il assume clairement son Ostalgie dans beaucoup d'interviews et particulièrement dans un reportage de la chaine Arte lui a consacré en 2011 dans le cadre d'une émission consacrée au bonheur. Plus récemment, la semaine dernière, il publie son autobiographie intitulée Der Tastenficker. An was ich mich so erinnern kann. Il raconte avec beaucoup de nostalgie sa jeunesse en RDA. Il explique que pour lui tout était simple à cette époque. Il dit : « Je ne m'occupais pas de l'État, je vivais dans un pays, pas dans un État. Je n'ai jamais vraiment eu le sentiment qu'il y avait un gouvernement et qu'on était gouverné. De toute façon on ne pouvait rien dire, rien décider. Jamais je ne me suis demandé si la RDA était viable d'un point de vue économique, si elle n'avait pas trop de dettes... Ça ne me venait pas à l'esprit. La situation me paraissait bien en l'état. On allait à des concerts, on en donnait nous-même, on était comme des enfants à jouer tout le temps »
Le sentiments qui ressort des témoignages de Flake sur la RDA est celui d'une vie simple, calme et paisible. Il n'a jamais eu à faire avec le système autoritaire. La seule chose qui nous paraît aujourd'hui comme étant une absence de liberté, ne s'est pas imposé en temps que tel pour les citoyens nés en RDA. Frau Worg, lorsque j'ai évoqué avec elle cette absence de liberté d'expression m'expliquait qu'elle ne voyait pas cela comme une privation de liberté : il y avait un discours à tenir en public, les critiques on les gardait dans le cercle de la famille, de la vie privée. Flake rapporte exactement le même témoignage. Il n'ont pas vécu cela comme une privation de liberté, mais c'était normal, c'était dans leur éducation. Et cela ne les a pas empêché d'être heureux.
La notion de bonheur est très présente dans bon nombre de témoignages. Je vous propose d'écouter Flake à ce sujet : « Ce qui était bien à l'Est c'est que personne ne pouvait faire carrière, il n'y avait aucun secteur où c'était possible. C'était absurde de vouloir gagner beaucoup d'argent, il n'y avait rien à acheter, et ça c'était super ! On avait pas besoin de jouer des coudes ou de se faire mousser, ça n'avait de toute façon aucun sens. La belle vie s'était de bien s'entendre avec ses congénère, ses voisins, d'avoir un bon cercle d'amis avec qui s'amuser, une famille sans histoire. C'était ça le bonheur »
La vie paisible et le bonheur simple que décrit Flake est véritablement ce qui ressort des témoignages des citoyens « lambda » de RDA. Le changement qui a probablement était le plus difficile à accepter après la chute du Mur, au delà d'un quotidien bouleversé, comme le montre Good bye Lenin !, c'est le changements des valeurs. Le bonheurs s'est mis à être autre : gagner beaucoup d'agent pour avoir une belle maison, une belle voiture, pour pouvoir consommer. Dans la société capitaliste le bonheur correspond à la consommation. Ce changement de valeurs a également changé la manière pour Flake, et les autres membres du groupes d'ailleurs, de faire de la musique. Tout à coup, faire de la musique s'est mis à signifier faire de l'argent.
Ainsi, le Réunification que l'on voit d'une manière collective comme un événement historique heureux, comme le sens de l'Histoire, n'a pas été vécu de cette manière par les individus. Il a fallu d'une part s'intégrer à cette nouvelle société et en accepter les valeurs. Voilà ce que dit Flake de la Réunification : « La Réunification n'a pas améliré mon quotidien. Ma vie à changé mais elle ne s'est pas amélioré qualitativement. Je ne me dis pas : 'Super maintenant je peux m'acheter un magnétoscope' ou 'Génial, j'ai le choix d'aller à Dusserldorf' »

          3. Explication de textes : « Amerika » et « Moskau »
Pour compléter ces témoignages, je souhaite compléter notre réflexion avec le commentaire de deux chansons du groupe Rammstein. Aussi étonnant que cela puisse paraître, parce qu'il chante en allemand, le groupe a un succès international, au point d'être devenus des ambassadeurs de la culture allemande. Pour preuve un sondage fait part le chaine de télévision Arte en 2012 intitulé « L'Allemagne, la France et vous » : à la question « quel musicien, groupe ou chanteur allemand avez-vous écouté ? », la réponse le plus citée par les français a été : Rammstein. Ou encore, il y a quelques semaines la Deutsche Welle, le service international de diffusion de l’Allemagne, a publié un article constatant la recrudescence de personnes apprenant l'allemand dans le monde : parmi les raisons avancées, le groupe Rammstein est cité et est choisi pour la photo d'illustration.
Ce groupe, peut être considéré comme un groupe d'Allemagne de l'Est, même s'il est fondé en 1994, car tous ces membres sont originaires de RDA. Trouve-t-on de l'Ostagie dans leurs textes ? Si le regret de la RDA n'apparait jamais de manière explicite dans leurs textes, il me semble intéressant de se pencher sur deux d'entre eux : « Amerika » et « Moskau ». Ils se situent l'un à la suite de l'autre au centre de l'album intitulé Reise, Reise. Le choix de faire suivre ces deux textes est significatif d'une volonté de faire à demi-mots la description d'un monde coupé en deux jusqu'à la fin des années 1980.
Sur un ton ironique, « Amerika » est décrite comme merveilleuse, une ronde joyeuse où nous vivons tous en harmonie. Pourtant, en regardant le texte de plus prêt, on se rend compte que qu'une dictature est décrite, la Maison Blanche donnant le « la » et dirigeant le monde entier :
« Quand on danse, je veux conduire
Même si vous tournez tout seuls
Laissez-vous un peu contrôler
Je vous montre la manière juste de faire

Nous formons une douce ronde
La liberté joue sur tous les violons
La musique vient de la Maison Blanche
Et Mickey Mouse est aux Portes de Paris
(...)
Je connais des pas très utiles
Et je vous protégerai d'un faux-pas
Et celui qui ne veut pas danser à la fin
Ne sait pas encore qu'il y est obligé »
Il est assez intéressant de noter que Lindemann a fait le choix de décrire les États-Unis comme une sorte de dictature de la liberté. Le ton ironique du texte rend la critique d'autant plus forte et significative du point de vue d'une éventuelle Ostalgie chez Rammstein. Il semblerai qu'il faille absolument encenser notre société occidentale qui s'est construite dans la seconde moitié du XXème siècle sur les bases d'une Amérique toute puissante et imposant ses code. Peut-être que nous pourrions aller plus loin en disant que les membres de Rammstein, en temps qu'ex-citoyens d'Allemagne de l'Est se doivent de bénir cette société libre, devrait-on dire « libéraliste », qui les a sauvé de la dictature communiste.
La chanson qui suit s'attèle à une description de la ville de Moscou, qui semble symboliser ce qu'on a appelé le bloc de l'Est.
Tout comme « Amerika » a son refrain en anglais, « Moskau » est en partie chantée en russe. La première phrase dit : « C'est une chanson sur la plus belle ville au monde, Moscou! ». On peut ainsi faire le rapprochement avec l'Amérique décrite précédemment comme « merveilleuse ». En ce qui concerne le ton de cette chanson, il est bien différent de la précédente : alors qu' « Amerika » décrivait un monde lisse et parfait, le visage de Moscou est bien plus sulfureux. En effet, elle est comparée à une prostituée plus très jeune, ayant une tache sur le front, des dents en or, les seins refait...
« Cette ville est une putain
Elle a des taches rouges sur le front
Ses dents sont en or
Elle est grasse et pourtant si douce
Sa bouche descend dans ma vallée
Quand je la paye
Elle se déshabille, mais que pour l'argent
Cette ville qui me tient en haleine

Moscou
Un, deux, trois
Moscou
Regardez
Les pionniers ici et là
Chantent des chansons pour Lénine

Elle est vieille et quand même belle
Je ne peux pas lui résister
Je ne peux pas résister
Elle poudre sa vieille peau
S'est fait refaire les seins
Elle s'est fait refaire
Elle m'excite, je souffre le martyr
Elle danse pour moi, je dois payer
Je dois payer
Elle couche avec moi, mais que pour l'argent
Elle est pourtant la plus belle ville du monde »
Malgré ce portrait pas très séduisant, Moscou est décrite comme très attirante : « Cette ville me tient en haleine », « Elle est vieille mais quand-même belle / je ne peux pas lui résister » ou encore « Elle couche avec moi, mais que pour l'argent / Elle est pourtant la plus belle ville du monde ». Sous ce paradoxe, nous pouvons peut-être voir de l'Ostalgie. Le portrait très peut attrayant fait de Moscou, en temps que symbole de la société qui s'est imposée à l'Est pendant quarante ans, semble représentatif de l'image qu'on en a, c'est à dire une société vieillotte, en retard et laide. Malgré cela, elle reste attirante, irrésistible pour le narrateur. Le procédé de cette chanson est à l'inverse de ce qui était fait pour « Amerika » qui a une belle apparence mais qui, sous ses airs de bonne fée, manipule et impose un nouveau type de dictature. « Moskau » décrite comme le symbole d'une société décriée, un dictature laide et arriérée, reste ce vers quoi le narrateur sent attiré.
Ces deux chansons semblent tenir ainsi un rôle symbolique et décrire une certaine Ostagie chez Rammstein. Le choix des symboles, et notamment l'ambiguité dans la description de « Moskau » laisse également apparaître un certain malaise dans ce sentiment d'Ostalgie de l'Est, tel qu'il était avant 1989.
Nous pourrions également aller plus loin que ces deux textes et dire que cette Ostalgie chez Rammstein est aussi présente dans leur musique. Flake et Schneider utilisent les adjectifs « sombre » et « monotone » pour décrire leurs vie en RDA. Ce sont exactement ces mêmes termes qu'on utilise pour décrire leur musique. Schneider, souligne d'ailleurs dans une interview à « Tracks » en 2009, le lien étroit entre leurs origines et leur musique : « C'est lié à notre vie à l'Est. En Allemagne de l'Est tout était sombre et gris, et les choses se passaient en secret. En plus, c'était les années 1980, c'est là que cette musique est apparue : le gothique, la wave... »
FAIRE UNE CONCLUSION




III. Die Ostalgie und die deutsche Identität
La question que nous abordons ce semestre est celle de l'identité allemande, et je souhaite dans cette troisième partie qui fait également gise de conclusion me questionner sur la place de l'Ostalgie dans la société allemande de ce début de XXIème siècle.

     A. Les enjeux économiques de l'Ostalgie
Du point de vue économique le premier constat que nous pouvons faire est le fait que le l'Ostalgie est avant tout un phénomène économique. Ceci paraît très paradoxal au regard des témoignages « ostalgiques » que nous venons d'évoquer et qui se constitue autour de la critique des valeurs du capitalisme. Être « ostalgique » c'est redécouvrir avec émotion les anciennes marques et produits vendu à l'Est avant 1989. Les industriels et les entreprises l'ont bien compris, la nostalgie doit faire vendre. Et alors que les ex-citoyens de RDA redécouvrent avec émotions depuis quelques années maintenant les cornichons de la Spreewald ou se rappelle du temps où l'argent n'était pas au cœur des valeur de la société autour d'une tasse de café Moka Fix-Gold, les riches industries capitalistes augmentent leurs chiffre d'affaire.
On retrouve ce même paradoxe, devrait-on dire cette ironie du sort, chez Rammstein. La nostalgie des vieilles valeurs, du temps où faire de la musique signifiait simplement s'amuser et passer du bon temps, n'est plus qu'un simple sentiments. En effet, le succès international du groupe a constitué une niche qu'il ne fallait pas laisser passer. Les musiciens faisant une critique acide du capitalisme vendent aujourd'hui tee-shirts, bijoux ou encore grills-pains à l'effigie du groupe.
Si on se demandait si l'Ostalgie constituait un risque pour l'économie allemande, nous sommes désormais rassuré. Ainsi l'Ostalgie semble même participer au miracle économique !

     B. Des questionnements politiques
Je ne vais pas m'étendre sur le sujet d'un lien entre Ostalgie et politique car il très complexe et finalement trop peu étudier.
En janvier 2009 Die Frankfurter Allgemeine Zeitung publie les résultat d'un sondage concernant l'état d'esprit des allemands à l'égard de la République fédérale et se sa constitution. À la question : « Quand, au XXe siècle, L'Allemagne s'est-elle selon vous le mieux portée ? », 58% des personnes interrogées ont répondu : « Dans l'Allemagne Réunifiée ». À la même question, 28% des ex-allemands de l'Est, soit plus d'un quart, ont répondu : « en RDA entre 1949 et 1989 ».
On constate que les Länder de l'Est on tendance à se tourner vers le parti Die Linke considéré comme étant l'héritier direct du SED. Partant de ce constat, un journaliste écrira dans Die Welt : « Le socialisme n'appartient pas au passé. Il est en vogue. » Il faut savoir que Die Linke a fait de la lutte contre l'Ostalgie une stratégie : en effet, en terme de communication, le parti a comprit que les communistes tenant un discours claironnant sur la RDA et ayant tendance à enjoliver l'ancien régime sont une mauvaise image et compromettent les chances aux élections. Aujourd'hui, les succès électoraux du parti Die Linke à l'Ouest ne permettent plus de faire d'amalgame entre ce parti et l'Ostalgie.
Certains tentent également de trouver un lien entre Ostalgie et les succès de l'extrême droite en ex-Allemagne de l'Est. Ceci paraît être contre nature. Toutefois on peut noter des thématiques communes comme l'anti-capitalisme, l'anti-américanisme, l'idée de justice sociale ou encore une critique de la mondialisation.
Il faut savoir qu'aucune étude approfondie n'a était faite sur l'expression politique de l'Ostalgie. Je tenais simplement à vous faire part des thématiques qui reviennent régulièrement dans la presse allemande, mais je n'irai pas plus loin dans mes réflexions.

     C. L'Ostalgie : une Réunification impossible ?
Au termes de cette évocation de l'Ostalgie, nous pouvons ainsi nous demander si elle ne serait pas un frein à la Réunification. La famille W. évoquait avec moi lors de notre entretien le fossé qu'ils ressentent parfois entre les ex-allemands de l'Est et ceux de l'Ouest. Ceci reprochent aux autres leur nostalgie, eux critiquent les valeurs capitalistes qui régissent l'Allemagne. Sans compter que l'intégration des anciens Länder de l'Est au miracle économique allemand n'est pas une évidence.
On constate que l'Allemagne et les allemands doivent assumer un passé difficile : en plus du IIIème Reich, de la guerre, il y a bien eu pendant plus de 40 ans deux Allemagnes, deux pays, deux régimes, deux évolutions et finalement deus histoires différentes. Au lendemain de la chute du Mur de Berlin et au cours des années 1990, la tendance était de penser et de dire que le « bonne » Allemagne avait fini par triomphé et que tout ce qui était en lien avec la RDA devait absolument dédaigné. Mais le miracle et les « lendemains qui chantent » promis par la Réunification ne sont jamais véritablement arrivé pour les allemands de l'Est. Et c'est de cette désillusion que semble être né l'Ostalgie. Toutefois, je ne crois pas qu'il soit juste d'en rester sur cette cause. Après mes recherches, après les différents témoignages dont j'ai pris connaissance, l'Ostalgie est aussi une volonté des ex-citoyens de RDA de se ré-approprier et d'assumer leur passé. Ce qu'ils semblent vouloir dire c'est qu'assumer le fait qu'ils aient pu vivre heureux en RDA et en garder de bon souvenirs, ne correspond pas à une négation de tout le reste : l'absence de liberté, le régime autoritaire ou la Stasi.

 Je crois qu'on peut également dire que l'Ostalgie n'est pas non plus une volonté de retourner en arrière. Mais revendiquer le droit de critiquer la société qui s'est imposée à eux à partir de 1989, est aussi un moyen de faire évoluer l'Allemagne vers une société meilleure.



Remerciements
Un très grand merci à la famille W. qui m'a accueilli chez elle pour évoquer leur passé et leur vie en Allemagne de l'Est. Je leurs en suis très reconnaissante.

Filmographie
Henckel von Donnersmarck Florian, Das Leben der Anderen, 2007
Becker Wolfgang, Good bye Lenin!, 2003
Haußmann Leander, Sonnenallee, 1999

Bibliographie : sur demande

Webographie

vendredi 13 juin 2014

« Zwitter » / « Ich weiß alles » - Mutter/texte de Till Lindemann pour Roland Kaiser

Zwitter

Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter

Ich hab ihr einen Kuss gestohlen
sie wollte sich ihn wiederholen
Ich hab sie nicht mehr losgelassen
Verschmolzen so zu einer Maße
So ist es mir nur allzurecht
Ich bin ein schönes Zweigeschlecht
Zwei Seelen unter meiner Brust
Zwei Geschlechter eine Lust

Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter

Ich gehe anders durch den Tag
Ich bin der schönste Mensch von allen
Ich sehe wunderbare Dinge
Die sind mir vorher gar nicht aufgefallen
Ich kann mich jeden Tag beglücken
Ich kann mir selber Rosen schicken
Da ist kein Zweiter und kein Dritter
Eins und eins das ist gleich

Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Ich bin so verliebt
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Ich bin in mich verliebt
Eins für mich eins für dich
Gibt es nicht für mich
Eins für mich eins für dich
Eins und eins das bin ich

Ich bin alleine doch nicht allein
Ich kann mit mir zusammen sein
Ich küsse früh mein Spiegelbild
Und schlafe abends mit mir ein
Wenn die anderen Mädchen suchten
Konnt ich mich schon selbst befruchten
So bin ich dann auch nicht verzagt
wenn einer zu mir Fick Dich sagt

Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Ich bin so verliebt
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Zwitter , Zwitter
Ich bin in mich verliebt
Eins für mich eins für dich
Gibt es nicht für mich
Eins für mich eins für dich
Eins und eins das bin ich

Traduction ici
Ich weiß alles




Ich weiß alles über dich.
Ich weiß wie Du wirklich bist.
Ich seh dich an,
erkenne dich.
Du bewegst dich so wie ich.

Ich weiß dass Du weißt, dass ich alles von dir weiß.

Du redest viel, ich bin verschwiegen
Wenn ich aufsteh, bleibst du liegen
Muss heimlich weinen, wenn du lachst
Ich weiß immer was du machst
Ich weiß wo du gewesen bist und das es mir das Herz zerfrisst

Ich weiß alles
Weißt auch du, alles was du sagtest?
Ich weiß alles
Kein Tabu, alles was du fragtest
Ich weiß alles, in mir zerbricht
Alles was du machtest, weißt du leider nicht, woran du nie dachtest

Immer wenn Du lügst will ich dir glauben.
Wenn Du mich betrügst, schliess ich die Augen
Wenn mir kalt ist, wird dir heiss.

Ich weiß, dass Du weißt, dass ich alles von dir weiß

Es zieht dich immer auf die Strassen
Du denkst du könntest was verpassen
Am Abend schminkst du dein Gesicht
Du darfst alles, darf ich nicht
Wirst mich für immer quälen, beschenken und bestehlen

Ich weiß alles
Weißt auch du alles was du sagtest?
Ich weiß alles
Kein Tabu, alles was du fragtest
Ich weiß alles, in mir zerbricht
Alles was du machtest, weißt du leider nicht, woran du nie dachtest

Ich weiß alles über dich,
Ich weiß wie du wirklich bist
Ich weiß was du gespürt hast als du es berührt hast
Du schaust mich an, hast mich erkannt
Spieglein, Spieglein an der Wand









Traduction ici




De retour avec un nouveau commentaire comparer : « Zwitter » et « Ich weiß alles », texte que Lindemann a écrit pour le chanteur allemand Roland Kaiser (je m'étais risquée à une traduction ici). Deux thèmes proches, voire identiques, pour ces textes auxquels on aurait pu ajouter également « Führe mich » dont j'ai déjà proposé un commentaire lors de la sortie du film de Lars von Tier Nymphomaniac. Ainsi, dans ces trois chansons, Lindemann traite du thème de la dualité de l'être. Les narrateurs de « Zwitter » et de « Ich weiß alles » parlent d'eux-même autour d'un jeu entre « je » et l'autre.

D'emblée on remarque une opposition dans la manière de traiter le sujet dans les deux textes : « Zwitter » assume dès le premier couplet la dualité dont il est question, « Je suis un beau bisexué / Deux âmes sous ma poitrine / Deux sexes et un seul désir », alors qu'il faut attendre les derniers mots de « Ich weiß alles » pour comprendre que le narrateur s'adresse à lui-même, « Tu me regardes, me reconnais / Miroir, miroir sur le mur ». Pourtant dans les deux cas Lindemann mets en scène le « je » et le « tu » ou le « elle » (dans « Zwitter ») pour exprimer une certaine dualité, voire une opposition.

« Zwitter » assume totalement cet aspect du double et du moi. Par son titre d'abord, « Hermaphrodite », puis dans la manière dont est menée l'écriture. La narrateur parle d' « elle » dans le premier couplet : « Je lui ai volé un baiser / Elle en voulait un autre », mais très vite le « je » prend le dessus et ce qui semblait être deux au départ ne fait plus qu'un seul : « Je suis un beau bisexué / […] / Il n'y a pas de deuxième ni de troisième / Un et un, c'est pareil ». On remarquera que Lindemann insiste sur l'aspect sexuel (oui, encore...) de cet état : « Je peux me donner du plaisir chaque jour / […] / Quand les autres filles cherchaient à assouvir leurs besoins / Je pouvais me féconder moi-même / Ainsi je ne suis pas embarrassé / Quand on me dit ''va te faire foutre'' ».
Si on lit se texte au regard de toute la thématique de l'album Mutter, on peut y voir l'expression de la sexualité adolescente : les premières expériences du plaisir sexuel sont solitaires. L'enfant, ou l'adolescent ressent lors de ces premières pratiques une plénitude que Lindemann arrive très bien à retranscrire ici : il n'y a pas de sensation ou de sentiment négatif dans cette chanson et les mots employés sont toujours positifs : « Ça me convient parfaitement ainsi », « Je suis le plus bel homme de l'univers / Je vois des choses merveilleuses ». Le narrateur en est au (merveilleux) stade de l'apprentissage de la sexualité qui ne connait pas la frustration.
Les plus romantiques peuvent aussi voir dans ce texte un métaphore du couple idéal. Ceux qui étaient deux au début ne forment plus qu'un seul et même être et la compréhension est totale : « Deux âmes sous ma poitrine / Deux sexes et un seul désir ». Une fois encore cette plénitude d'un couple idéal renvoie, pour moi, aux premières amours. Les adolescents s'aiment de cette manière : un véritable fusion à la fois psychique et physique dans laquelle chacun est capable de s'abandonner totalement à l'autre au point de ne former plus qu'un seul.
Ainsi, « Zwitter » aborde la thématique du moi double et entier. Cette dualité est vécu de manière positive et c'est en cela qu'elle est en lien avec l'enfance ou l'adolescence.

Aussi, « Ich weiß alles » reprend ce même thème, toutefois le texte est emprunt d'une plus grande maturité et, alors que « Zwitter » évoquait le bonheur et la plénitude, de mélancolie. « Je » et « tu » sont ici en opposition : « Tu parles beaucoup, je suis discret / Quand je me lève, tu reste couché / Je dois pleurer en secret quand tu ris ». Ainsi, plus de bonheur mais une opposition difficile à vivre. L'atmosphère légère et joyeuse du premier texte est remplacée ici par la pesanteur d'un secret : « Toujours quand tu mens je veux te croire / Quand tu me trompe, je ferme les yeux ». Si « Zwitter » pouvait sous-entendre la description d'un couple, l'évocation est plus franchement explicite dans ce texte. En effet, Lindemann joue autour de cette notion secret et de mensonge : « tu » trompe « je » et « je » en souffre. Et si on ne lit pas attentivement le dernier vers de la chanson, on pense qu'elle parle d'un couple qui se fait du mal et se ment.
C'est à la lecture des derniers mot du texte, « Tu me regarde, me reconnaît / Miroir, miroir sur le mur », qu'il prend tout son sens et une plus grande profondeur. En effet, le narrateur semble être arrivé à un certain âge et lorsqu'il regarde en arrière, il à l'impression de s'être trompé lui-même, de s'être menti. La personne qu'il voulait être à l'aube de sa vie est loin de celle qu'il est devenu, il s'est trahi lui-même et en souffre beaucoup. Nous pourrions même aller jusqu'à dire que les deux chansons décrivent le même personnege, adolescent dans « Zwitter » et homme mature, voire un vieillard, dans « Ich weiß alles ». La dualité assumée de l'adolescence est devenue un véritable poids.

Au delà même de cette notion de double, les deux textes sont une métaphore de l'existence humaine. En effet, l'adolescent est plein de principes quant à la manière de mener sa vie future, le vieillard lui ne peut  que regarder en arrière et voir qu'il n'est pas devenu l'homme qu'il souhaitait être étant jeune. On peut ainsi dire que « Zwitter » est parfaitement en accord avec le reste des textes de Mutter qui prennent le point de vue de l'enfant/adolescent (ou traite plus généralement de ces problématique là). « Ich weiß alles » est d'une sincérité déconcertante : il semblerai que Lindemann aborde dans ce texte un vécu et un ressenti plus personnel. Le véritable auteur créant un narrateur de toute pièce (comme c'est le cas pour « Zwitter » et plus généralement dans l'album Mutter) devient un poète composant des textes plus personnels.

Cela me permets de dire quelques mots sur l'album Mutter. La critique que l'on peut faire à cet album, et que j'ai souvent entendu d'ailleurs, est le fait que certaines chansons restent froides et assez mécaniques. Je m'abstiendrait de faire le moindre commentaire sur la musique, toutefois je pense que cette « froideur » vient également des textes. Je crois que c'est l'album ou Lindemann présente des narrateur assez éloigné de ce qu'il est lui-même au moment où il écrit. S'il se met dans la peau d'un adolescent ou d'un enfant, on retrouve toujours une sorte de mise à distance très ironique. Les textes de Mutter (pas tous) manquent à mon avis de sincérité parfois.

Pour conclure sur le sujet initial, on peut dire que l'on trouve dans les textes de Lindemann des sujets récurants. Malgré leur thématique commune, « Zwitter » et « Ich weiß alles » la traitent de manière totalement différente proposant aussi des atmosphères diverses. Traité à presque quinze années d'écart, cela nous permet aussi de voir l'évolution, la maturité du point de vue de l'auteur sur un même sujet. Il me semblait ainsi intéressant de confronter ces deux textes. 

mercredi 4 juin 2014

« Ich weiß alles » traduction du texte écrit par Till Lindemann pour Roland Kaiser

Un article un peu différent aujourd'hui, puisque je propose une traduction du texte que Till Lindemann à écrit pour le chanteur allemand Roland Kaiser. Kaiser a sorti son dernier album Seelenbahnen il y a quelques jours, et c'est dans cet opus qu'il interprète le texte de Lindemann.

Voici donc ma tentative de traduction. Je précise que mon niveau d'allemand est bien trop faible pour retranscrire véritablement le style de Till, et les passages en italique sont assez mal traduits, mais je ne peux malheureusement pas faire mieux.

Peut-être, proposerai-je bientôt un commentaire littéraire du texte…



Ich weiß alles über dich.
Ich weiß wie Du wirklich bist.
Ich seh dich an,
erkenne dich.
Du bewegst dich so wie ich.

Ich weiß dass Du weißt, dass ich alles von dir weiß.

Du redest viel, ich bin verschwiegen
Wenn ich aufsteh, bleibst du liegen
Muss heimlich weinen, wenn du lachst
Ich weiß immer was du machst
Ich weiß wo du gewesen bist und das es mir das Herz zerfrisst

Ich weiß alles
Weißt auch du, alles was du sagtest?
Ich weiß alles
Kein Tabu, alles was du fragtest
Ich weiß alles, in mir zerbricht
Alles was du machtest, weißt du leider nicht, woran du nie dachtest

Immer wenn Du lügst will ich dir glauben.
Wenn Du mich betrügst, schliess ich die Augen
Wenn mir kalt ist, wird dir heiss.

Ich weiß, dass Du weißt, dass ich alles von dir weiß

Es zieht dich immer auf die Strassen
Du denkst du könntest was verpassen
Am Abend schminkst du dein Gesicht
Du darfst alles, darf ich nicht
Wirst mich für immer quälen, beschenken und bestehlen

Ich weiß alles
Weißt auch du alles was du sagtest?
Ich weiß alles
Kein Tabu, alles was du fragtest
Ich weiß alles, in mir zerbricht
Alles was du machtest, weißt du leider nicht, woran du nie dachtest

Ich weiß alles über dich,
Ich weiß wie du wirklich bist
Ich weiß was du gespürt hast als du es berührt hast
Du schaust mich an, hast mich erkannt
Spieglein, Spieglein an der Wand
Je sais tout de toi
Je sais comment tu es vraiment/réellement
Je te regarde
(Je) te reconnais
Tu te comportes comme moi

Je sais que tu sais que je sais tout de toi

Tu parles beaucoup, je suis discret (secret)
Quand je me lève, tu restes couché
(Je) dois pleurer en secret quand tu ris
Je sais toujours ce que tu fais
Je sais où tu étais et cela me brise le coeur

Je sais tout
Sais-tu aussi, tout ce que tu disais ?
Je sais tout
Pas de tabou, tout ce que tu demandais
Je sais tout, en moi brisé
Tout ce que tu faisais, tu ne sais malheureusement pas à quoi tu n'as jamais pensé

Toujours quand tu mens je veux te croire
Quand tu me trompe, je ferme les yeux
Quand j'ai froid, tu as chaud

Je sais que tu sais que je sais tout

Cela te tire toujours dans les rues
Tu penses (que) tu pouvais manquer quelque chose
Le soir tu te maquilles le visage
Tu peux (à le droit) à/de tout, je ne peux (ai le droit) à/de rien
Tu me tourmenteras/m'obsèderas toujours
Offrir et reprendre (voler)

Je sais tout
Sais-tu aussi, tout ce que tu disais ?
Je sais tout
Pas de tabou, tout ce que tu demandais
Je sais tout, en moi brisé
Tout ce que tu faisais, tu ne sais malheureusement pas à quoi tu n'as jamais pensé

Je sais tout de toi
Je sais comment tu es réellement/véritablement
Je sais ce que tu as ressenti lorsque tu l'as touché
Tu me regardes, me reconnais
Miroir, miroir sur le mur



samedi 24 mai 2014

« Mutter » / « Donaukinder » - Mutter / Liebe ist für alle da



Mutter

Die Tränen greiser Kinderschar
Sich zieh sie auf ein Weißes Haar
Werf in die Luft die nasse Kette
Und wünsch mir dass ich eine Mutter hätte
Keine Sonne die mir scheint
keine Brust hat Milch geweint
In meiner Kehle steckt ein Schlauch
Hab keinen Nabel auf dem Bauch

Mutter, Mutter
Mutter, Mutter

Ich durfte keine Nippel lecken
Und keine Falte zum verstecken
Niemand gab mir einen Namen
Gezeugt in Hast und ohne Samen

Der Mutter die mich nie geboren
Hab ich heute Nacht geschworen
Ich werd ihr eine Krankheit schenken
Und sie danach im Fluss versenken

Mutter, Mutter
Mutter, Mutter
Mutter, Mutter
Mutter, Mutter

In ihren Lungen wohnt ein Aal
Auf meiner Stirn ein Muttermal
Entferne es mit Messers Kuss
Auch wenn ich daran sterben muss

Mutter, Mutter, Mutter, Mutter

In ihren Lungen wohnt ein Aal
Auf meiner Stirn ein Muttermal
Entferne es mit Messers Kuss
Auch wenn ich verbluten muss

Mutter, oh gib mir Kraft
Mutter, Mutter
Oh gib mir Kraft
Mutter, Mutter
Oh gib mir Kraft
Mutter, Mutter
Oh gib mir Kraft

Donaukinder


Donau quellt ein Aderlass
Wo Trost und Leid zerfließen
Nichts gutes liegt verborgen nass
In deinen feuchten Wiesen

Keiner weiß was hier geschah
Die Fluten rostig rot
Die Fische waren atemlos
Und alle Schwäne tot
An den Ufern in den Wiesen
Die Tiere wurden krank
Aus den Auen in den Fluß
Trieb abscheulicher Gestank

Wo sind die Kinder
Niemand weiß was hier geschehn
Keiner hat etwas gesehen
Wo sind die Kinder
Niemand hat etwas gesehen

Mütter standen bald am Strom
Und weinten eine Flut
Auf die Felder, durch die Deiche
Stieg das Leid in alle Teiche
Schwarze Fahnen auf der Stadt
Alle Ratten fett und satt
Die Brunnen giftig, aller Ort
Und die Menschen zogen fort

Wo sind die Kinder
Niemand weiß was hier geschehn
Keiner hat etwas gesehen
Wo sind die Kinder
Niemand hat etwas gesehen

Donau quellt ein Aderlass
Wo Trost und Leid zerfließen
Nichts gutes liegt verborgen nass
In deinen feuchten Wiesen

Wo sind die Kinder
Niemand weiß was hier geschehn
Keiner hat etwas gesehen
Wo sind die Kinder
Niemand hat etwas gesehen






Un autre commentaire comparé : « Mutter » et « Donaukinder » cette fois-ci. Autant dire la vérité, l'idée de confronter les deux textes ne vient pas de moi mais de la page Facebook Donaukinder sur laquelle était écrit hier soir que les deux chansons se faisaient écho, « more or less » (soit dit en passant, la page Donau n'apparait plus sur Facebook ce matin... Mais absolument AUCUNE raison de paniquer...). Je sens que cet article va être un peu long, car j'aimerai dans un premier temps expliquer chacun des deux textes individuellement avant de les confronter.

Commençons donc par « Mutter ». Chanson éponyme de l'album sorti en 2001, elle est en son centre, sorte de pilier qui porte la thématique générale des dix autres chansons. Le narrateur semble adulte, mais il parle de l'enfant qu'il était, et qu'il est encore. Le premier vers souligne ce double aspect puisqu'il évoque « Les larmes d'une bande d'enfants-vieillard » que la narrateur « enfile sur un cheveu blanc / [il] jette ce cordon humide en l'air ». L'image semble dire que le narrateur a vieilli, mais qu'il n'a pas pu grandir, parce qu'il a été abandonné : « J'aurais aimé avoir une mère », dit-il. La suite de ce premier couplet s'attarde sur l'idée d'abandon, de solitude, et surtout de manque d'amour, « Il n'y a aucun soleil qui m'illumine / Aucune poitrine n'a pleuré de lait pour moi ». Il a manqué de tout ce qui est nécessaire à l'homme pour être un humain accompli et sensible, une mère, à la fois nourricière et aimant (les mots du deuxième couplet évoquent exactement cette même idée : « Je ne pouvais téter aucun sein / Je n'avais aucun repli pour m'abriter »). Ainsi, il lui semble qu'il n'est pas humain, qu'il est le résultat d'une expérience purement scientifique dont tout sentiment reste absent : « dans ma gorge, il y a un tube / Je n'ai pas de nombril sur le ventre » et au couplet suivant il ajoute « Conçu à la hâte et sans semence ». Ne connaissant pas ses origines, il souffre aussi de ne pas connaître son identité : « Personne ne m'a donné de nom ». Dans ce contexte, les répétitions de « Maman » évoquent les pleurs de l'enfant cherchant désespérément sa mère.

Il semble que le troisième couplet marque un tournant. Si le début de la chanson évoque la douleur de ne pas savoir d'où on vient, qui on est, d'avoir manqué d'affection et d'amour, c'est la haine qui emprunt la seconde moitié du texte : « À la mère qui ne m'a jamais fait naître / J'ai juré cette nuit / De la rendre malade / Et de la noyer ensuite dans le fleuve ». Reste sous-jacente ici une idée de révolte adolescente. Noyer la mère peut être ici une métaphore représentant le besoin de nier ses parents pour affirmer sa propre identité. Le narrateur enfant n'a beau pas avoir eu de parents, l'adolescent qu'il est ressent tout de même ce violent besoin de révolte. Le couplet suivant, répété à deux reprises, va dans ce sens, mais semble sous-entendre autre chose de plus. En effet, il semble difficile d'interpréter le vers : « Dans ses poumons loge une anguille ». Je ne suis pas sûre de pouvoir bien l'interpréter, je vais donc le faire de manière subjective, dans le but de pouvoir lier « Mutter » à « Donaukinder » toute à l'heure. Il semblerait que le changement qu'il s'opère entre le début du texte et cette deuxième partie est le fait que le narrateur aurait découvert son identité, ses origine, il aurait retrouver sa mère. Et ce qu'il a découvert est inacceptable. L'anguille dans les poumons de la mère représente pour moi la honte et le pécher : elle a fait quelque chose de grave que le narrateur aurait préférer ne jamais découvrir. En effet, maintenant qu'il semble savoir qui est sa mère, « Sur mon visage, il y a une tache de naissance » (ce qui entre en totale opposition avec les premiers et deuxièmes couplets « J' n'ai pas de nombril sur le ventre », etc.), il est encore plus malade qu'il ne l'était en ne connaissant pas ses origine. Désormais il voudrait effacer cette identité, « Sur mon visage, il y a une tache de naissance / Que le baiser du couteau me l'enlève ! », à tel point qu'il est prêt à cesser de vivre, « Même si je dois en mourir ». Alors, ce qu'il a découvert, la raison de son abandon est une chose des plus terrible peut-être révélée dans « Donaukinder ». Mais avant d'y venir un dernier mot sur « Mutter ». Les répétitions de « Maman » qui au début était les pleurs de l'enfant abandonnée, deviennent alors de cris de haine, « Maman qu'as-tu fais ! » semble-il crier. « Oh donne-moi la force » de survivre à cette infamie, de te tuer...


« Donaukinder » narre une sombre histoire, où il est question de maladie, d'épidémie. « Le Danube s'écoule en une hémorragie / Où réconfort et souffrance se répandent » : le mal dont il est question est intimement lié au fleuve, et, paradoxalement (encore une fois!) le fleuve est aussi un « réconfort » face à ce mal. Pourquoi ? Il faut avancer un peu dans l'explication, mais nous y reviendrons. Lindemann insiste sur la description de cette épidémie qui à décimé tout un paysage : « Les flots rouges comme la rouille / Les poissons étaient asphyxiés / Et tous les cygnes morts / Sur les berges, dans les près / Les animaux tombent malade / […], une horrible puanteur / Se déversa dans le fleuve ». Ainsi un mal autour du fleuve fait mourir les être vivant, change l'eau de couleur. Et, là encore, un paradoxe, puisque à la fois le fleuve être la source de l'épidémie, mais quelqu'un ou quelque chose aurait « [déversé] » ce mal dans le fleuve. Quel est ce mal ?

Si un partie du texte insiste sur la description d'un mal déformant toute une région, celle du Danube, l'autre partie à pour thématique principale le secret, le fait de ne pas savoir. Le refrain est essentiellement constitué autour du secret : « Où sont les enfants / Personne ne sait ce qui est arrivé ici / Personne n'a rien vu ». Idée renforcée par le premier vers du deuxième couplet : « Personne ne sait ce qui s'est passé ici ». On insiste ici sur le fait que personne ne peut dire ce qui s'est passé, que personne ne comprend pourquoi tous ces animaux mort, tout ce paysage détruit. Quant aux enfants, sont-ils morts eux aussi ? « Personne n''a rien vu ». Pourtant, des personnes étaient présentes sur la berge : « des mères se tinrent au bord du fleuve / Et versèrent un flots de larmes ». Les enfants se seraient-ils noyés dans le Danube ? Revenons au premier couplet. Plus haut, nous soulignions le fait qu'une épidémie avait d'abord décimé les êtres vivants au bord du Danube, et que, paradoxalement, si la maladie semblait venir du fleuve, on y a déversé le mal dedans. L'interprétation qu'on peut en faire serait : il y a eu une grave épidémie qui a atteint les populations humaines et animales de cette régions, tuant les être les plus faibles, donc les enfants (concernant la nature de la maladie, j'ai envie de dire peu importe, même se l'évocation des « rats repus et gras » peut faire penser à la peste). Tellement le nombre de victime a été grand, les parents n'ont pas pu donner de sépulture aux morts, ils les ont donc jeté dans le fleuve. Leur pêcher a peut-être même été plus grand : de peur de voir les enfants encore en vie atteints pas la maladie, ils ont préféré les noyer.

Cette faute grave explique alors toute cette atmosphère de secret qui pèse autour de ces événements, que l'on ne peut que deviner en négatif. La vérité est que tout le monde sait ce qu'il s'est passé, la population est en deuil, « Des drapeaux noirs sur toute la ville », mais la honte est si grande qu'on n'ose rien dire, qu'on préfère faire comme si on ne savait pas. Le pêcher est si grand, la honte si insupportable, que « les hommes partirent » emportant avec eux le secret. Et seul ce paysage dévasté porte encore les stigmates du drame.


Quel lien faire alors entre « Mutter » et « Donaukinder » ? On pourrait penser que le narrateur s'exprimant dans « Mutter » est un des enfants du Danube rescapé de l'épidémie et de la noyade. Orphelin, il cherche à savoir d'où il vient. Il découvre alors le secret, le drame qui s'est joué sur les berges de Danube. Ainsi la lecture de « Donaukinder » révèlerait l'histoire du narrateur de « Mutter », les deux textes, pouvant être lus et compris de manière indépendante, se font alors écho. Je me demande alors si nous savons quand est-ce que Lindemann a écrit « Donaukinder ». Il ne serait pas impossible que l'écriture de ce texte date de la création de l'album Mutter et que le texte n'ait finalement pas été retenu. Le groupe a-t-il peut-être même travailler sur la composition musicale de « Donaukinder » pendant le période Mutter. Ce n'est qu'une supposition de ma part, mais le solo de guitare de cette chanson me rappelle systématiquement celui que l'on trouve dans « Mein Herz brennt ». De plus, « Donaukinder » ne se trouve pas au cœur de l'album Liebe ist für alle da, mais dans les bonus. Pourquoi, alors qu'il s'agit, selon moi, de l'un des meilleures chanson de l'album ? Peut-être parce qu'ils auraient ressorti et retravaillé une vieille démo datant de leur travail sur Mutter. Absolument rien ne peut confirmer (ou infirmer) mes dires, c'est une réflexion personnelle. D'un autre côté, Lindemann aurait très bien pu écrire les paroles de « Donaukinder » au moment de composer Liebe ist für alle da en référence à Mutter. Quoi qu'il en soit, et peut-importe les dates d'écriture et de composition, les deux textes partagent un lien certain.